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30/11/2023 : Modification du contrat de travail : un formalisme strict 

L’employeur qui souhaite opérer une modification d’un élément essentiel du contrat de travail pour motif économique (souvent lié à une réorganisation) doit respecter une procédure encadrée.

En effet, l’article L 1222-6 du code du travail dispose : « Lorsque l’employeur envisage la modification d’un élément essentiel du contrat de travail pour l’un des motifs économiques énoncés à l’article L 1233-3 en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de notification informe le salarié qu’il dispose d’un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d’un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée ».

En cas de refus du salarié, l’employeur pourrait licencier pour motif économique

Mais cette proposition ne peut être faite sans précaution dans sa rédaction sous peine de voir le licenciement invalidé par les juges.

C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans plusieurs affaires.

Dans la première, la fermeture de l’établissement où exerçait une salariée ayant été décidée, une modification du contrat de travail par transfert du lieu de travail lui a été proposée.

A la suite de son refus l’employeur l’a licenciée pour motif économique, licenciement que la salariée a contesté ; estimant que la proposition de modification ne mentionnait pas la date d’affectation définitive dans le nouveau centre optique et ne précisait pas le ou les lieux temporaires d’affectation de la salariée entre temps si elle acceptait la modification, indiquant juste qu’ils se situeraient dans les Landes.

Elle estimait ainsi que la proposition n’était ni sérieuse ni loyale, et ce d’autant plus qu’elle avait deux jeunes enfants à charge : l’employeur aurait donc proposé un lieu d’affectation aléatoire incompatible avec sa vie de famille afin de la décourager.

La Cour de cassation lui donne raison.

En effet, l’employeur « est tenu de l’informer de ses nouvelles conditions d’emploi afin de lui permettre de prendre position sur l’offre qui lui est faite en mesurant les conséquences de son choix. A défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ».

Faute de précision de la date d’affectation définitive et de lieux temporaires d’affectation, elle estime que la proposition de modification du contrat n’était pas suffisamment précise pour permettre à l’intéressée de mesurer ces conséquences. ; le licenciement ne pouvait être vu comme fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En second lieu, la Cour de cassation a également estimé que le motif économique qui conduit à la proposition de modification du contrat doit être précisé.

Une salariée avait reçu une lettre lui notifiant qu’en application de L 1222-6 du code du travail, elle disposait d’un délai d’un mois à compter de la réception pour faire connaître son acceptation ou son refus d’une proposition de réduction de son temps de travail.

L’employeur lui avait indiqué qu’il envisageait de réduire son temps de travail à 20 heures hebdomadaires avec une réduction de sa rémunération et il indiquait également que l’activité de l’établissement ne permettait pas de conserver un temps complet et le conduisait à mettre en place une nouvelle organisation.

Il avait ensuite considéré que la modification du temps de travail était valablement intervenue dès lors que la salariée ne l’avait pas refusée dans le délai d’un mois.

A tort pour les juges.

En effet, la procédure légale n’est applicable que lorsque l’employeur envisage la modification pour un motif économique tel que défini par la loi, de sorte que l’employeur, qui n’a pas mentionné dans la lettre de proposition de modification du contrat le motif économique pour lequel la modification est envisagée ne peut se prévaloir, en l’absence de réponse du salarié dans le mois, d’une acceptation de la modification du contrat de travail.

Puisqu’il n’était pas allégué que la réorganisation mentionnée dans la proposition résultait de difficultés économiques, de mutations technologiques ou qu’elle était indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise, la règle selon laquelle à défaut de réponse dans le délai d’un mois la salariée est réputée avoir accepté la modification ne s’appliquait donc pas, et la réduction du temps de travail ne pouvait lui être imposée.

Il est donc primordial d’être attentif à la forme autant qu’au fonds dans ce cas.

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