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La garantie des vices cachés

Sommaire:

Le domaine de la garantie

Le contrat de vente

Exclusion à raison de l’objet ou de la forme de la vente

L’objet de la garantie

La notion de vice

La gravité du vice

Le régime de la garantie

Les parties à la garantie

L’action en garantie

– L’action rédhibitoire

– L’action estimatoire

Les clauses relatives à la garantie

 

 

I – Le domaine de la garantie

 

Le contrat de vente

L’application de la garantie prévue aux articles 1641 et suivants du Code Civil dépend de l’existence d’une vente.

Le contrat de vente est défini à l’article 1582 du Code Civil comme « une convention par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la payer »

La garantie des vices cachés n’existe donc pas en présence d’un autre contrat, contrat d’entreprise ou de crédit-bail par exemple.

La garantie des vices cachés est due dès lors qu’il y a vente d’un bien, meuble ou immeuble, corporel ou incorporel qu’il soit neuf ou d’occasion.

 

Exclusion à raison de l’objet ou de la forme de la vente

La garantie n’a pas vocation à s’appliquer aux ventes d’immeubles à construire qui sont régies par les dispositions spécifiques des articles 1601-1 et suivants du code Civil.

Elle n’est pas due en cas de vente par autorité de justice au titre desquelles l’on peut citer la vente de meubles aux enchères par l’intermédiaire d’un commissaire-priseur ou la vente sur saisie immobilière à la barre du Tribunal.

Un régime spécial prévu par le code Rural existe s’agissant des ventes d’animaux domestiques affectés de diverses maladies ou défauts.

 

II – L’objet de la garantie

 

Le vendeur doit garantie à l’acheteur contre les vices cachés.

Il faut préciser la notion de vice en soulignant que l’existence n’en est admise qu’au cas où il présente une certaine gravité et définir à quelles conditions il apparaît comme caché.

A cela s’ajoute que le vice doit être antérieur à la vente pour être à la charge du vendeur et qu’il incombe à l’acquéreur de prouver que ces diverses exigences sont satisfaites.

 

La notion de vice :

Le vice est défini par l’article 1641 du Code Civil comme un défaut de la chose qui la rend impropre à l’usage auquel on la destine ou qui diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix.

Le vice est donc caractérisé par ses conséquences.

Le vice s’identifie à toute défectuosité qui empêche la chose de rendre et de rendre pleinement les services que l’on attend.

Il résidera dans le mauvais état ou le mauvais fonctionnement de la chose, l’impossibilité de s’en servir dans des conditions satisfaisantes, les conséquences nuisibles produites à l’occasion d’une utilisation normale.

Il faut que la qualité qui fait défaut à la chose soit l’une des principales qualités que l’on reconnaît à la chose.

Pour un produit acquis à neuf, on aura tendance à considérer comme normal que l’acheteur puisse exiger qu’il soit absolument sans défaut.

Il ne suffit pas qu’il manque une des diverses qualités que l’acheteur pouvait envisager ou que le vendeur avait promise, si cette absence est sans incidence réelle sur l’utilité de la chose.

Le vice peut être directement fonction de la destination particulière envisagée par l’acquéreur dès lors que le vendeur la lui a fournie à cette fin (chien de compagnie ou chien reproducteur, véhicule d’occasion ou véhicule de collection).

Pour déterminer si la chose est atteinte d’un vice, il faut procéder à une appréciation en fonction de l’utilité qui peut en être attendue selon l’opinion commune.

Cependant, le défaut peut tenir à l’absence d’une qualité que les parties ont eue en vue.

 

La gravité du vice :

Il ne suffit pas que la chose soit atteinte dans une de ses qualités principales.

Il faut encore que le vice révélé présente une gravité suffisante.

L’action pourra être rejeté si le défaut est facilement réparable.

Ne constituent pas par exemple, un vice caché les vibrations et turbulences d’air présentées par un véhicule automobile qui diminuent seulement l’agrément de la chose mais qui sont sans influence sur son utilité économique et objective.

Le caractère caché du vice :

Pour que le vendeur soit tenu d’en répondre, le vice doit être caché.

L’exigence est de bon sens : si l’acheteur avait connaissance du vice, il a acheté à ses risques et périls et n’a pas lieu à se plaindre de la défectuosité.

Le vice sera considéré comme apparent lorsqu’il se révèle à l’occasion de vérifications immédiates et d’investigations normales.

Sera ainsi considéré comme apparent non seulement le vice qui est évident ou manifeste mais aussi celui qu’un examen attentif permettait de découvrir.

Les Tribunaux, pour apprécier si le vice est apparent ou caché, tiennent compte de la compétence technique de l’acquéreur, ce qui amène à distinguer le professionnel du profane.

Le vice ne doit pas avoir été connu de l’acquéreur.

L’antériorité du vice par rapport à la vente :

Pour être couvert par la garantie, le vice doit être antérieur à la vente et plus précisément au transfert de propriété.

En effet, si le vice est postérieur à la vente, celle-ci a porté sur un objet en bon état.

Il faut que le vice soit simplement en germe au moment de la vente.

L’antériorité sera admise si le bien présente un défaut de conception ou de fabrication.

Preuve incombant à l’acquéreur :

Il incombe à l’acquéreur d’apporter la preuve du vice caché tel que décrit ci-dessus.

La preuve peut en être apportée par une expertise.

 

III – Le régime de la garantie

 

Les parties à la garantie

La garantie est due par le vendeur à l’acheteur.

Il existe toutefois des « extensions » de la garantie à d’autres personnes que l’acheteur et le vendeur.

  • Le créancier de la garantie :

    Le créancier de la garantie est d’abord l’acquéreur.

    Mais la règle est désormais fixée que la garantie née d’un premier contrat suit la chose à partir de sa mise en circulation et au gré des ventes successives : les sous-acquéreurs pourront donc agir contre le vendeur initial.

  • Le débiteur de la garantie :

    Le débiteur de la garantie est au premier chef, le vendeur immédiat de la chose.

    L’acquéreur peut aussi remonter la chaîne des ventes et agir contre un vendeur antérieur pour autant que le vice soit préexistant à cette précédente vente ; il peut remonter jusqu’au fabricant.

    Il peut agir à l’encontre de l’un ou de plusieurs des vendeurs successifs.

 

L’action en garantie :

Le délai pour agir :

Aux termes des dispositions de l’article 1648 du Code Civil modifié par une ordonnance du 17 février 2005, « l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intenté par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ».

Le point de départ du délai se situe au jour de la découverte du vice par l’acquéreur.

Il appartient aux Tribunaux de déterminer à quel moment l’acquéreur a eu cette connaissance.

Le résultat de l’action en garantie :

L’action en garantie contre les vices cachés peut déboucher sur plusieurs résultats.

Résolution de la vente ou diminution du prix

L’article 1644 du Code Civil prévoit au choix de l’acquéreur, la possibilité d’obtenir la résolution du contrat (action rédhibitoire : restitution de la chose et du prix) ou une diminution du prix (action estimatoire : remboursement partiel).

L’acheteur peut donc exercer l’action rédhibitoire ou estimatoire.

Le choix est laissé à son appréciation ; il est en principe absolument libre.

Il n’y a pas à distinguer selon la gravité du vice.

Toutefois, les Tribunaux refusent d’accorder la résolution si le vice de la chose n’est pas d’une importance suffisante ou si la remise en état facile à réaliser est proposée par le vendeur dans des conditions satisfaisantes.

  • L’action rédhibitoire aboutit à l’anéantissement du contrat.

Dès lors, l’acquéreur doit rendre la chose et le vendeur restituer le prix.

Des réparations effectuées par le vendeur sur la chose n’interdisent pas l’exercice de l’action rédhibitoire.

Ce n’est que dans l’hypothèse où l’acquéreur ne peut restituer la chose que l’action rédhibitoire lui sera interdite ; il ne pourra alors exercer que l’action estimatoire.

En revanche, si la perte de la chose résulte du vice lui-même, ce sera au vendeur d’un répondre ; l’action rédhibitoire développera ses effets comme si la chose pouvait être restituée.

  • L’action estimatoire a pour objet une réduction du prix : l’acheteur réclame le remboursement d’une partie du prix payé et qui correspond à la perte de qualité que le vice imprime sur la chose.

Il peut en effet préférer conserver la chose malgré sa valeur inférieure à celle envisagée ou sa moindre utilité.

La réduction du prix est proportionnelle à diminution de la valeur de la chose.

Remise en état ou remplacement de la chose (exécution en nature)

Il peut être de l’intérêt des parties, d’obtenir l’exécution en nature de la garantie à savoir la remise en état ou le remplacement de la chose. Dommages et intérêts

Quelle que soit la voie choisie, des dommages et intérêts pourront éventuellement être alloués.

En effet, en plus de l’action en résolution, l’acquéreur est en droit de demander l’indemnisation du préjudice qu’il a subi et que l’anéantissement du contrat ne suffit pas à effacer.

L’acquéreur peut demander des dommages et intérêts en complément de la diminution du prix.

Le préjudice peut résulter :

  • des frais occasionnés par la vente,
  • de soucis d’ordre matériel ou moral,
  • de l’indisponibilité ou de l’immobilisation de la chose,
  • d’une perte d’exploitation…

Entre ces différents chefs de préjudice, une distinction est faite par les articles 1645 et 1646 du Code Civil.

1° S’agissant des frais occasionnés par la vente, la réparation est due par le vendeur en toutes circonstances, qu’il ait ignoré ou connu le vice (article 1646 du Code Civil)

2° Quant à recevoir d’autres dommages et intérêts, l’acquéreur ne peut y prétendre que s’il établit la mauvaise foi du vendeur (1645 du Code Civil).

L’allocation de dommages et intérêts n’a lieu d’être, aux termes de l’article 1645 du Code Civil, que si le vendeur connaissait les vices de la chose lors de la vente.

Le vendeur professionnel est assimilé au vendeur de mauvaise foi en raison des compétences techniques qui sont les siennes et qui le placent dans un rapport de supériorité vis-à-vis de l’acquéreur.

Est considéré comme vendeur professionnel, le fabricant de la chose, celui dont l’activité habituelle est la vente de tels biens, les marchands de biens, le distributeur ou le concessionnaire.

 

IV – Les clauses relatives à la garantie

 

Les conventions relatives à la garantie des vices cachés sont fréquentes en matière de vente.

Il faut signaler :

  • Les clauses restreignant la garantie (clauses exonératoires ou de non-garantie et clauses limitatives)

    Celles-ci sont inopérantes et sans effet, en présence d’un vendeur professionnel, l’acquéreur fut-il profane ou également professionnel.

    La jurisprudence semble toutefois admettre que les conventions restreignant la garantie doivent produire leurs effets entre vendeur et acquéreur professionnel de même spécialité (activités voisines ou similaires).

  • Les clauses aménageant la garantie (la garantie contractuelle)

    Il s’agit de clauses organisant et détaillant la garantie contre les vices.

    Elles figurent souvent dans « les conditions générales de vente ».

    Ces clauses prévoient souvent une limitation de garantie, les modalités de remise en état ou de remplacement de la chose et le délai durant lequel il est possible à l’acquéreur de le demander.

    L’efficacité de ces clauses demeure réduite dès lors que l’acquéreur pourra le plus souvent se prévaloir de la garantie légale contre les vices cachés lorsque celle-ci lui est plus favorable ; il pourra alors évincer de telles clauses.

  • Les clauses extensives de garantie

    Ces clauses sont rares.

    Dans la mesure où elles élargissent le droit à la garantie, aucune règle d’ordre public protectrice des parties ne vient s’opposer à leur efficacité.