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Le compte Facebook privé du salarié peut servir de preuve d’une faute grave

Newsletter Octobre 2020

Le compte Facebook privé du salarié peut servir de preuve d’une faute grave

Un arrêt très remarqué de la Cour de Cassation en date du 30 Septembre 2020 apporte d’importantes précisions en matière de preuve en justice s’agissant notamment de l’exploitation d’un compte Facebook privé d’une salariée.

Engagée en qualité de chef de projet export par une célèbre société de vêtements et de pour enfants, une salariée est licenciée pour faute grave, notamment pour publier sur son compte Facebook une photographie de la nouvelle collection de la marque présentée exclusivement aux commerciaux de la société.

Elle conteste son licenciement.

Elle a d’abord fait valoir que la preuve des faits invoqués contre elle dans une procédure disciplinaire issue de publications figurant sur son compte Facebook privé, rapportée par l’intermédiaire d’un autre salarié de l’entreprise autorisé à y accéder, est irrecevable et inopposable puisqu’il s’agissait d’un compte Facebook privé, non accessible au public mais seulement aux personnes autorisées par elle.

Elle ajoutait également que l’employeur ne pouvait porter une atteinte disproportionnée et déloyale au droit au respect de la vie privée de sorte qu’il ne pouvait s’immiscer abusivement dans les publications du salarié sur les réseaux sociaux.

La Cour n’a pas retenu cette argumentation.

Elle estime que si en vertu du principe de loyauté dans l’administration de la preuve, l’employeur ne peut avoir recours à un stratagème pour recueillir une preuve, la publication litigieuse avait été spontanément communiquée à l’employeur par un mail d’une autre salariée de l’entreprise autorisée à accéder comme « amie » sur le compte privé Facebook de la salariée licenciée de sorte que le procédé ne peut être considéré comme déloyal.

En outre, il résulte des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du Code civil et 9 du code de procédure civile, que « le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi ».

La production en justice par l’employeur d’une photographie extraite du compte privé Facebook de la salariée, auquel il n’était pas autorisé à accéder, et d’éléments d’identification des « amis » professionnels du secteur d’activité destinataires de cette publication pouvait constituer une atteinte à la vie privée.

Cependant, l’employeur s’était borné à produire la photographie de la future collection de la société publiée par l’intéressée sur son compte Facebook et le profil professionnel de certains de ses « amis » travaillant dans le même secteur d’activité et il n’avait fait procéder à un constat d’huissier que pour contrecarrer la contestation de la salariée quant à l’identité du titulaire du compte.

Cette production d’éléments portant atteinte à la vie privée de la salariée était dès lors indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi, c’est à dire la défense de l’intérêt légitime de l’employeur à la confidentialité de ses affaires.

Le fait de reconnaître que le droit à la preuve pouvait justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi est quelque peu nouveau.

La Cour ouvre donc un champs plus ouvert en matière de preuve.

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