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20/10/2022 : Temps partiel : attention à la requalification à temps complet

Beaucoup de situations peuvent conduire les juges à considérer qu’un salarié à temps partiel puisse revendiquer un temps complet avec les rappels de salaires correspondants ce qui, financièrement, peut être très lourd.

Parmi ces situations, il y en a une qui doit retenir l’attention.

Les salariés à temps partiel peuvent signer avec leur employeur un avenant dit de complément d’heures, par lequel ils s’engagent, sur un temps donné, à travailler au-delà de la durée du travail initialement contractualisée.

Cet avenant est-il pour autant autorisé à porter la durée du travail de ces salariés au niveau de la durée légale ou conventionnelle de travail ? 

C’est à cette question que la Cour de cassation est venue répondre, dans un arrêt rendu au mois de septembre qui confirme les principes déjà adoptés auparavant.

La loi autorise les employeurs et les salariés à temps partiel à signer des avenants permettant, pour un temps donné, de revoir à la hausse la durée du travail initialement contractualisée (par exemple lors de périodes de pointe). 

Ce dispositif dit des heures de complément se distingue, des heures complémentaires qui ne relèvent pas du contractuel, mais bel et bien du pouvoir de direction de l’employeur, à l’instar des heures supplémentaires des salariés à temps plein.

 

Dès lors :

  • Le recours aux compléments d’heures nécessite que le salarié ait accepté la proposition de l’employeur par la signature d’un avenant à son contrat de travail ;
  • Le recours aux heures complémentaires peut être unilatéralement décidé par l’employeur, dans la limite d’un certain volume.

 

Les employeurs ne sont pas tous autorisés à recourir aux compléments d’heures. 

Pour qu’ils le soient, une convention ou un accord de branche étendu doit le permettre. Et c’est précisément à cette convention ou cet accord qu’il revient de prévoir la majoration salariale des heures effectuées dans le cadre d’un avenant.

Dans l’affaire soumise aux juges, une salariée travaille dans le secteur du nettoyage sous couvert d’un contrat de travail à temps partiel à 86,67 heures mensuelles.

Elle se voit proposer la signature d’un avenant complément d’heures portant sa durée mensuelle de travail à 152 heures pour une période de 11 mois. 

152 heures mensuelles, c’est-à-dire très légèrement au-dessus du niveau de la durée du travail d’un salarié à temps plein.  

Passé la période prévue, la salariée retourne à son temps de travail initial.

La salariée saisit alors le conseil de prud’hommes d’une action en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein. 

La salariée est déboutée au motif que ni le Code du travail, ni la convention collective des entreprises de propreté et services associés n’avait entendu limiter le nombre d’heures susceptibles d’être réalisées dans le cadre d’un avenant complément d’heure.

La Cour d’Appel confirmera cette décision.

La Cour de Cassation est alors saisie au motif que le code du travail qui, selon elle, devait être lu comme interdisant, dans le cadre d’un avenant complément d’heures de porter la durée du travail à un niveau égal ou supérieur à la durée légale du travail.

 

Elle aura raison.

La Cour de Cassation estime que :

– Si le Code du travail n’interdit pas expressément aux avenants compléments d’heures d’atteindre ou de dépasser le niveau de la durée légale de travail, il précise cependant que « les heures complémentaires accomplies au-delà de la durée déterminée par l’avenant donnent lieu à une majoration salariale qui ne peut être inférieure à 25% ». 

Ce texte prévoit donc la possible réalisation, par un salarié signataire d’un avenant complément d’heures, d’heures complémentaires.

– Le Code du travail, indique par ailleurs que ces heures complémentaires « ne peuvent avoir pour effet de porter la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, au niveau de la durée de travail fixée conventionnellement ».

– En combinant ces dispositions, il convient de considérer que si des heures complémentaires peuvent être réalisées au-delà de la durée de travail fixée à l’avenant complément d’heures, c’est donc bien que cette durée ne peut être fixée à hauteur de la durée légale ou conventionnelle, sinon les heures réalisées au-delà ne seraient plus être des heures complémentaires mais bien des heures supplémentaires

Or, la sanction de l’inobservation de ce plafond est la requalification du temps partiel en temps complet à compter de la date à laquelle le dépassement a eu lieu.

Il est donc indispensable d’avoir une gestion des temps partiels particulièrement prudente.  

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