Un récent arrêt de la Cour de cassation renforce l’obligation pour l’employeur d’exécuter le contrat de travail de bonne foi, notamment lorsqu’il est alerté par les représentants du personnel.
Il était ici question de l’inclusion de la rémunération variable dans l’assiette de calcul des congés payés.
Cet arrêt doit conduire les entreprises à prendre au sérieux les demandes et observations du CSE, sous peine de voir reconnue une exécution déloyale du contrat et d’exposer l’employeur à une condamnation à verser des dommages et intérêts au salarié concerné.
Contexte : bonne foi et rôle du CSE
L’article L. 1222-1 du Code du travail impose à l’employeur, comme au salarié, d’exécuter le contrat de travail de bonne foi.
Dans l’affaire jugée le 26 novembre 2025, le comité d’entreprise (aujourd’hui CSE) avait, dès 2008, attiré l’attention de l’employeur sur l’absence de prise en compte de la rémunération variable dans le calcul de l’indemnité de congés payés.
Aucune vérification sérieuse n’a été engagée par l’employeur pendant près de dix ans.
La Cour de cassation censure l’analyse de la cour d’appel qui avait minimisé ces alertes au motif qu’elles n’avaient pas été réitérées par la suite.
Elle juge qu’une telle inertie caractérise une carence persistante de l’employeur dans la recherche de l’irrégularité et dans la mise en œuvre des moyens nécessaires pour y remédier.
Il s’agit alors d’un manquement à son obligation d’exécuter le contrat de bonne foi.
Quelles sont les conséquences de cet arrêt ?
Le simple fait, pour un employeur, d’avoir été interpellé par le CSE sur un possible non-respect de dispositions légales (par exemple sur les congés payés, la rémunération, le temps de travail) fait naître une obligation positive de vérifier et, le cas échéant, de corriger la pratique.
Si les représentants du personnel ne reviennent pas régulièrement sur le sujet ne permet pas à l’employeur de considérer le problème comme réglé ou négligeable.
La décision ouvre ainsi la voie à une indemnisation autonome du salarié au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail.
Cela s’ajoute à la régularisation financière éventuellement dans la limite des prescriptions applicables.
Ainsi ignorer une alerte du CSE est désormais clairement identifiée comme un manquement fautif.
Quelles sont les bonnes pratiques à adopter ?
Pour sécuriser leurs pratiques, les employeurs ont intérêt à mettre en place une procédure claire de traitement des alertes du CSE et des remontées collectives des salariés.
Traçabilité : consigner systématiquement les questions soulevées par le CSE dans les procès-verbaux et dans un registre de suivi, avec désignation d’un responsable (RH/juridique) et d’un délai de traitement.
- Analyse juridique rapide : en cas de doute sur la conformité d’une pratique (ex. assiette des congés payés, primes variables, durée du travail), solliciter sans délai un audit interne ou un avis auprès d’un avocat en droit du travail.
- Mise en conformité effective : si l’irrégularité est confirmée, il faut corriger la pratique pour l’avenir, mais aussi définir une stratégie de régularisation du passé compatible avec les règles de prescription, en appréciant le risque contentieux associé.
- Dialogue social renforcé : informer le CSE des démarches entreprises (vérification, conclusions, mesures correctrices) pour démontrer la bonne foi de l’employeur en cas de contentieux ultérieur.
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